MORCENX et l'urbanisme républicain.

ENTRE GARE ET EGLISE

Comme dans l'ouest américain mainte fois vu dans les westerns, la ville actuelle de Morcenx est bien née de sa gare.C'est en effet avec l'arrivée du chemin de fer de Bordeaux vers Bayonne en 1854 qu'une station y a été établie sur un plateau de landes alors désertes, à quelques trois kilomètres de l'ancien bourg . De là s'embrancha dès 1857 une bifurcation vers Mont-de-Marsan, prolongée vers Tarbes en 1859. Enfin, en 1889, une ligne secondaire fut ouverte à destination de Mézos par la Société des chemins de fer du département des Landes.


Arrivée du premier train le 28 août 1854, Ouverture du tronçon de Lamothe à Dax le 12 novembre 1854. 


C'est tout près de ce "nœud ferroviaire" qu'une première agglomération s'est rapidement développée à l'initiative de la Compagnie des chemins de fer du Midi et du Canal latéral à la Garonne, compagnie privée fondée par les frères Pereire. Des premières constructions de bois apparurent aux abords même de la gare, dont l'alignement des "chalets" destinés au logement des cheminots, ayant accepté de s'installer dans cette contrée, tels des pionniers. Puis la compagnie créa  vers 1864 un groupe d'écoles primaires dans un ancien atelier de dépôt de matériel en planches pour les enfants des employés, ouverte ensuite aux enfants des environs.




C'est auprès de ces premières installations que se sont bâties de nombreuses constructions qui formèrent assez vite un hameau important. Une agglomération nouvelle était crée.

Le trafic prenant de l'importance, le buffet de la gare fut agrandi en 1865.

Devenue un grand carrefour de marchandises principalement issues de l'exploitation du bois et de ses dérivés, la ville connut alors un véritable essor économique alors que le vieux bourg devint un hameau endormi. Le quartier prit tellement d'importance que la mairie de la commune y fut implantée en 1886. et devient chef-lieu de canton en 1888, au détriment d'Arjuzanx, l'ancienne capitale de la baronnie du Brassenx. De même, l'église de l'ancien bourg étant trop éloignée pour la population, une nouvelle église, dont l'orientation est d'ailleurs contraire a celle de la tradition religieuse, y fut édifiée entre 1889 et 1895.

L'administration communale était passée à cette époque des notables terriens de l'ancien bourg aux négociants et industriels implantés dans ce nouveau quartier. L'ancien ordre rural laissait place au monde industriel, le foncier au négoce. 


De cette histoire de naissance et développement d'une agglomération nouvelle il reste aujourd'hui le témoignage qu'offre la découverte du centre du village autour de sa très longue place ombragée par des rangées de platanes, et bordée des bâtiments symétriques de chaque coté d'un axe perpendiculaire à la gare et se prolongeant jusqu'à l'église à son extrémité. Ce qui en fait un exemple dans les Landes d'un urbanisme réfléchi et d'une gestion communale progressiste.


La conception et le schéma de la ville, commun à beaucoup de villes neuves, depuis les bastides médiévales jusqu'aux villes américaines, furent adoptés dès 1859. Aussi l'agglomération s'articula autour de l'axe  et de l'espace laissé libre entre l'église et la gare, par la construction de bâtiments alignées dans un quadrillage régulier, et une grande place centrale. 


1 Gare -2 Eglise - 3 Ecole des garçons- 4 Ecole des filles -5 la première salle des fêtes ( Pomade 1921) -6 Marché -Fronton couvert (Centre Jean Jaurès) -7 Poste -8 Justice de Paix, et dispensaire -9 Salle des Fêtes ( Cinéma) -10 Mairie -11 Bourse du Travail - 12 Kiosque à musique



Un groupe scolaire fut construit dans les années 1881 à 1884. Composé de deux bâtiments allongés disposées de part et d'autre de l'avenue . Coté nord, celui de l'école

des filles, et coté sud  celui des garçons. chacun terminé par des pavillons de logement. Une extension est intervenue postérieurement vers 1922 (Albert Pomade, architecte)

hier et aujourd'hui

Mais pour répondre aux besoins de la commune en plein développement on ne se contenta pas de construire les équipements habituels que dont une mairie, une justice de paix ou un marché couvert. On voulut édifier des équipements sociaux, culturels,sportifs, associatifs. Il en fut ainsi de la nouvelle salle des fêtes remplaçant celle construite vers 1919 près de l'école des garçons, du fronton couvert, de la bibliothèque populaire, du dispensaire, de la bourse du travail, du cercle de la jeunesse.

Le crédit de cette expérience d'architecture publique doit être accordé au maire radical socialiste de l'époque, M. Léon Brouste qui présida à la destinée de la commune de 1936 à 1977 (hors période 1941-1944)

C'est à partir de 1936 que l'architecte montois Franck Bonnefous a conçu et dessiné la place Léo-Bouyssou actuelle, regroupant l'essentiel des édifices municipaux - "le complexe républicain urbain" - avec un véritable souci d'urbanisme, cherchant à composer et à articuler les différents espaces autour de l'axe principal de la ville 

Ainsi deux grandes constructions sont implantées face à face, de manière symétrique  de chaque coté de l'axe de l'avenue centrale. Elles sont composées d'un bâtiment central rectangulaire encadré de petits corps bas en retour.

Au sud, un marché-fronton couvert dans le corps central (actuellement salles polyvalentes du Centre Jean Jaurès), avec à chaque extrémité un bâtiment formant abside. L'un à l'est accueillant la Poste, l'autre à l'ouest pour la Justice de paix et un dispensaire (école de musique actuelle)

source: DRAC Aquitaine

Au nord un foyer municipal, nouvelle salle des fêtes actuellement cinéma, dans le corps central, avec à chaque extrémité un bâtiment formant abside. L'un à l'est accueillant la mairie, l'autre à l'ouest pour la Bourse du Travail

Ces deux bâtiments aux volumes géométriques simples. à corniche et fronton central ont été construits dans les années 1938-1940 et achevés après la guerre. Ils contribuent à embellir le cœur de la ville par leur architecture et décoration dans le style de l'époque. En façade, des baies en demi cercle, donnant à l'origine accès à des galeries ouvertes, sont surmontés de trois travées ou panneaux eux mêmes divisés en trois zones comportant chacune deux bandes décorés par des bas-reliefs réalisés par le sculpteur Lucien Danglade. On y retrouve les thèmes de style "modernisme régional" présentant des scènes de loisirs, jeux, et sports pour le Centre Jean Jaurès, scènes de vie, activités agricoles, et paysages traditionnels landais pour le cinéma.


ancienne salle des fêtes





A LIRE
Claude LAROCHE - Morcenx, la cité idéale - Le Festin n°14 juin 1994
Marc TARIS - Lorsque fleurit le rose, Morcenx, une histoire locale de la continuité d'une politique socialiste de 1936 à 1996 - ed. LeTravailleur Landais 1997
Frédéric ASSE -Morcenx 1850 1950, un siècle d'architecture et d'urbanisme dans une ville landaise (mémoire de maîtrise Université Bordeaux III 1994)

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