QUAND SAINT-SEVER ETAIT ENCEINTE

Saint-Sever, le promeneur un peu curieux peut découvrir, ici, une vieille et rustique porte médiévale, là, une grosse tour ronde, et, ici et là, des discrets pans de murs de rempart à l'arrière de plusieurs maisons. Ce sont les vestiges épars d'une enceinte ayant entouré la ville entre les XIIème et XVIIème siècles.



Au XIIème siècle (vers 1100), les habitants de la ville née à l'ombre de l'abbaye bénédictine fondée à la fin du Xème siècle et sur la voie de Vézelay vers Compostelle, obtinrent en effet de leur seigneur abbé Suavius le droit de se fortifier. Une première enceinte fut alors construite autour de l'abbaye et du petit noyau urbain primitif. Les abbés et moines conservaient le contrôle des portes et en gardaient les clés. 

La porte du Touron, en sa première arche du côté de la ville, serait le vestige de cette première enceinte. L'entrée principale de la ville se faisait alors au nord-est par une porte, dite porte Jouliou, dont l'emplacement a été déterminé à hauteur du n°16 de l'actuelle rue Lafayette, et qui donnait accès au plateau de Morlanne et à la côte de Brille.. On suppose qu'elle était précédée d'un pont-levis (ou dormant) franchissant un ravin, ou douve, comblés à la fin du XVIIIe siècle. Lors de l'extension des remparts au XVe siècle elle a été remplacée par la porte dite de Mauleon..

La prospérité s'accrut au cours du XIIIe siècle, sous la suzeraineté anglaise, et la ville devint un important centre commercial et administratif (installation de la cour de justice du sénéchalat anglais de Gascogne, dont la cour générale réunie ici en 1273 par le roi Edouard d'Angleterre pour y juger le comte Gaston de Béarn).
  
Conquise à l'été 1295 par Charles de Valois pour le compte de Philippe le Bel après un siège de trois mois, reprise par les anglais, assiégée en 1360 par les troupes du seigneur de Lescun à la solde du roi de France, la ville redevint définitivement française par la prise en deux temps en 1442 par Charles VII puis le comte de Foix * ( on connait même le nom de l'écuyer, Jacques le Jude, récompensé pour avoir été le premier à entrer par-dessus les murailles de la ville lors de l'assaut de juin 1442 - BNF, Cabinet des titres, vol. 685, fol 111 v°). Les jurats obtinrent alors de Charles VII l'accord du droit de construire une seconde enceinte plus étendue en 1450, pour la mise en défense du couvent des Jacobins et des faubourgs qui s'étaient développés. 
* Raymond Ritter a placé ce siège par le comte de Foix Gaston IV en novembre-décembre 1443 - Cf. Siège et prise de St-Sever - Bull. Société de Borda 1948, p 14-25.

la prise de Saint-Sever en juin 1442
(Vigiles de Charles VII fol.117 - BNF)

un siège au XVe siècle

Les tours rondes (et à pans coupé, coté ville) de Mauléon ou Hontang au nord, et de Bonnehé ou Bourrouilhan à l'angle sud-est (des canonnières remplaçant les archères droites y furent percées) sont les vestiges de cette seconde enceinte du XVe siècle, de même que l'arche extérieure de la porte du Touron au nord ouest, et les divers pans de murs disséminés dans la ville. Une enquête de 1615 sur l'état des murailles mentionnait les quatre tours de Mauleon, de la Guillerie, des Jacobins, et de Sauret (?).

essai de reconstitution des fortifications
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Les portes de l'Aiguillerie ou de la Guillerie au sud est (entrée de la rue Lamarque) et de Bellocq à l'est (rue Bellocq) ont malheureusement disparu. Celle des Pontils au sud-ouest (rue de Pontix,1), précédée d'un pont en bois franchissant une douve, a été détruite en 1806. L'emplacement d'une dernière mentionnée dans l'enquête de 1615, et nommée porte Lespous, reste indéterminé.
Au nord et à l'ouest, les ouvrages étaient édifiés sur l'abrupt d'une levée de terre, alors qu'au sud ils étaient précédés de douves.

La ville ayant été plusieurs fois mise à sac au cours des XIIIe et XIVe siècles, puis lors des guerres de religion (sac de la ville le 11 septembre 1569 par les troupes du capitaine protestant Montgomery), les murailles ruinées ou éventrées perdirent leur caractère défensif et finirent par servir d'appui aux maisons qui en forment le tour.

portes du Touron
photo Michel Dubau (c) Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel; (c) Commune de Saint-Sever


Une vue de Saint-Sever à la fin du XVIIe siècle
selon Dom Pierre-Daniel Du Buisson
extrait de l'Historiae Monasterii S.Severi - Libri X (BNF)

Dès le XVIIe siècle, les besoins de l'urbanisme et de la modernisation de la voirie justifièrent le percement ou le démantèlement des fortifications restantes. En 1722, on commençait à percer des fenêtres dans les murailles pour éclairer les maisons accolées. En 1778, la restauration de la place du Cap du Pouy et l'élargissement de la rue Lafayette menant à la place principale du Tour du sol provoqua la destruction des deux portes de Jouliou ( rue Lafayette,16) et de Mauleon (place du Cap du Pouy). Une partie des remparts fut enfin détruite à la dynamite en 1905.



Tour Mauleon
 (c) Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel ; (c) Commune de Saint-Sever


Deux arches vestiges du pont de Pontix édifié en 1719 en remplacement du pont en bois franchissant la douve (asséchée et comblée au XIXème siècle) en avant de la porte de l'enceinte ont été récemment découvertes dans une cave sous la rue (19 rue de Pontix) au croisement de la rue Tournante.

Des fondations dans une cave de la rue du Bellocq (n°2) pourraient être le vestige d'une petite tour circulaire proche de la porte du Bellocq.

canonnière de la tour de Bourrouilhan
 (c) Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel ; (c) Commune de Saint-Sever


 Documents d'archives

Source:

Région Nouvelle Aquitaine -inventaire général du patrimoineculturel 

 

Statuts de la ville accordés par l'abbé Suavius évoquant les remparts, 1092-1106 (AD Landes H 14 folio 81).
Contrat de construction pont et porte Mauléon, 22 juillet 1450 (AM Saint-Sever CC 1 / 8)
Contrat pour l’achèvement de la construction des remparts, 14 septembre 1450 (AM Saint-Sever DD 1/1/6)
Contrat pour la restauration des murs et portes de la ville, 28 mai 1465 (AM Saint-Sever DD 1/1/7)
Permission du roi pour la réparation des murailles du château, 2 août 1579 (AM Saint-Sever DD 1/1/11)
Rapport sur l'état des murailles de la ville, 2 septembre 1613 (AM Saint-Sever DD 3/1/12)
État des murailles, du château et du monastère, 20 juillet 1615 (AM Saint-Sever CC 5 / 19)
Délibération pour le percement d'ouvertures dans la muraille, 1722 (AM Saint-Sever BB 5)
Décision de destruction d’un rempart, 19 juin 1791 (AM Saint-Sever BB 5)
Arrêté du préfet pour la destruction de la porte du Pontix, 9 juillet 1806 (AM Saint-Sever 9 M 11)

 

A lire :

FEREY Marie - "Les fortifications de la ville de Saint-Sever. Etat de la recherche", in Bulletin de la Société de Borda, Dax, 2016, 3° trim, p. 285-298   

 

Sites internet :  

Ypf-dico-blogspot.com, 

de Jean Paul Farbos, qui détaille les traces encore visibles des fortifications

Vestiges de murs visibles Impasse Mauléon, Impasse Jouliou, place Louis Fournier, rue Lafayette (34), place du Tour du Sol (4,8), rue de Pontix (6,19),Rue du Général Durrieu (10, 14, 20); rue du Général Lamarque (21), rue Louis Sentex (4) - Vestiges des tours visibles Impasse Mauléon (tour Mauleon), rue Albert-Larrède et place de la République (tour de Bourrouilhan), rue Louis Fournier (Echauguette angle nord- ouest des enceintes) - Vestiges de la double porte du Touron ou des Poussoles, 

 AVAP Saint-Sever

 pour les plans de la ville

d'après un extrait des plans AVAP
des cabinets Anne Thévenin architecte dplg / et Etienne Saliège architecte dplg
mis en ligne pat l'Aire de Valorisation de l'Architecture et du Patrimoine
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pour les curieux

ICI 

Narration du XVème siècle du second siège et prise de Saint-Sever en 1443 par le comte Gaston IV de Foix

(Ville qui s’était à nouveau retournée vers les anglais après sa prise d'assaut le 25 juin 1442 , lendemain de la journée de Tartas)
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