MORT DU ROI DE NAVARRE A HAGETMAU



Cela s’est passé dans la nuit du 24 au 25  mai 1555
Ce roi de Navarre (en fait de la seule Basse-Navarre) était Henri II d’Albret qui était devenu en 1527, le beau frère de François 1er en épousant sa sœur aînée Marguerite d’Angoulème, devenue Marguerite de Navarre. 

trois visages d'Henri II d Albret roi de Navarre

Elevé à la cour de France, il s'était en effet lié d'une étroite amitié avec celui qui n’était encore que François d’Angoulème. Puis il l’avait accompagné à la guerre d’Italie qui s’était terminée par le désastre de Pavie, mais lui, également fait prisonnier, avait réussi à s’évader et à regagner la France. A son retour de captivité à Madrid, François 1er ne manqua d’ailleurs pas de faire un détour sur sa route de Dax à Mont de Marsan pour venir séjourner au château d’Hagetmau en mars 1526.


Mais pourquoi donc à Hagetmau, et dans quelles circonstances ?

La résidence habituelle du roi de Navarre était le château de Pau. C’est là que sa fille Jeanne d’Albret, après avoir traversé toute la France, était venue donner naissance à son petit-fils Henri dix huit mois plus tôt. On connaît le bonheur du grand-père et l’épisode de la frottée des lèvres du nourrisson à l’ail et au Jurançon. Henri II s’occupa  des premiers mois du futur Henri IV alors que sa mère rejoignait son époux Antoine de Bourbon sur les champs de bataille de Picardie.

A l’écart de son époux et de ses maîtresses, Marguerite de Navarre préférait séjourner au château des Albret à Nérac dans lequel elle entretint longtemps une cour prestigieuse en y accueillant tout ce que le royaume comptait de lettrés et d’humanités. Mais après la mort de son royal frère en 1547, c’est dans son petit château d’Odos en Bigorre où elle s’était retirée qu’elle décéda deux ans plus tard. 
   
En 1555, Henri de Navarre avait cinquante trois ans. Depuis trois ans sa santé s’était dégradée et les derniers mois l’avaient vu considérablement décliner. « Il n’avait plus cette ferme façon de vivre, et allait variant à tous propos, faisant le mécontent. Ce pauvre prince futait partout, mais plus il allait, plus le mal le suivait et lui faisait la guerre ».

Certains auteurs ont écrit  qu’après avoir un temps résidé à Nérac, il se serait rendu au printemps 1555 au château de Casteljaloux,  berceau de sires d’Albret où le couvent des Cordeliers abritait les sépultures de ses ancêtres. Ce serait alors sur le chemin de retour vers Pau et le Béarn  qu’une rechute de fièvre quarte, son mal habituel,  l’aurait arrêté dans le château d’Hagetmau ...

D’autres ont écrit que conscient de sa fin prochaine, il était venu à Hagetmau faire ses dévotions, selon ses habitudes, à la crypte où reposaient le restes de Saint-Girons, et  y aurait été subitement saisi d'une forte fièvre

Ce château qui accueillit Henri II, et dont il ne reste rien aujourd’hui, était celui de la puissante et riche famille d’Andouins  qui avait recueilli la succession des anciens barons de Lescun en réunissant les baronnies d’Hagetmau et de Lescun et la vicomté de Louvigny. Or, c’est justement en 1555 que la vicomté de Louvigny, unie à la baronnie d’Hagetmau, fut érigée en comté au profit de Paul d’Andouins. Celui-ci,  gentilhomme de la chambre d’Henri II était sénéchal du Béarn comme le fut son père. Il  sera tué au siège de Rouen en 1562. (Jean, son frère aîné, avait été tué au siège de Landrecies en 1545)

Paul d Andouins, le baron d'Hagetmau
(portraits de Clouet -musée de Chantilly)

Là, en ce mois de mai 1555, se trouvait probablement  la petite Diane qui sera plus tard la  fameuse et belle Corisande d’Andouins. Elle était née au château l’année précédente, quelques jours après le futur Henri IV avec lequel elle jouera enfant (sous la tutelle de Jeanne d’Albret) avant d’être sa première et fidèle favorite de coeur. C’est elle qui, par son mariage en 1568, apportera Hagetmau à la famille voisine de Gramont. Le château fut sa résidence préférée lorsqu’elle était devenue comtesse de Guiche (Montaigne y est venu,  et  Henri IV souvent). Mais après sa mort, il finit par être abandonné par les comtes de Gramont au profit de Bidache. C’est dans ce château d'Hagetmau que naquit en 1604 Antoine III de Gramont pair et maréchal de France.


Ceci étant dit, on peut pourtant lire une toute autre version de la mort d’Henri II de Navarre dans un ouvrage de Balthasar Guynaud -La Correspondance des prophéties de Nostradamus avec l' histoire depuis Henri II jusqu'à Louis le Grand.- édité en 1693

« L’Historien Sainte-Marthe au Livre 14, parlant de la Maison de France, aussi-bien que les Mémoires de Languedoc par Catel, disent qu’Henry dAlbert II de nom Roi de Navarre, se tua en travaillant un Cheval le 25 mai 1555. qu’il étoit l’aîné de Jean III qui fut depuis Roi de Navarre à la place de son Frère. Que ce Prince nommé par Nostrdamus l’aîné Royal, maniant un cheva, le picqua si rudement, et qu’il prit sa course d'une telle vitesse, qu’Henri voyant le danger où il étoit, haussa la bride avec tant de violence, que la bouche du cheval fut élipée, c’est à dire que le mords lui offensa les deux lipes, haute et basse. Le mal que ressentit le cheval, ne l'arrêta point; au contraire suivant son mouvement et sa fougue, il se mit à sauter et ruer, tellement que le Roi étant tombé, son pied s'arrêta dans l'étrier, et qu'en cet état il fut traîné et tiré longtemps, ensuite de quoi il mourut le même ».

Tout cela pour expliquer la Centurie VII  quatrain 38 des Prophéties de Michel Nostradamus, dont la première édition est publiée le 4 mai 1555, mois de la mort d’Henri de Navarre: L’aîné Royal sur Coursier voltigeant, Picquer viendra si rudement courir,Gueule lipée, pied dans l’Etrier plaignant,Traîné, tiré, horriblement mourir
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On dit que Charles d Albret était brave, bon gouverneur de son pays, aimé de ses sujets, mais  aussi mélancolique, brutal et jaloux.

Il est mort sans avoir pu réaliser son grand projet de recouvrer la Haute-Navarre espagnole  prise à son père Jean d Albret par Ferdinand d’Aragon en 1512, et alors même qu’il  préparait dans des conditions favorables une attaque de l’Espagne

 Son corps fut transporté et déposé  à Lescar selon son  voeu d’être enterré à Pampelune, la nécropole de anciens rois de Navarre. Mais cela étant devenu impossible, il fut inhumé dans la cathédrale de Lescar le 25 juillet 1555. Son coeur  fut offert à l’abbaye de Juilly (Seine-et-Marne) à la restauration de laquelle il avait largement participé. Il y est toujours conservé dans la chapelle du collège. 

Henri II de Navarre
(musée de Pau)