Il est vain de chercher ce magnifique portail gothique en faisant le tour de la massive et peu gracieuse cathédrale de Dax, de style néo machin-chose.. néo grec, dit-on.
Comme "chez nous, à Dax" rien n'est comme ailleurs, il faut, pour admirer cette entrée monumentale, être ... à l'intérieur .
En effet, ce trésor architectural , principal intérêt de la cathédrale, se trouve originalement placé dans le transept nord.
Il est le vestige de la cathédrale gothique du XIIIe siècle qui s'est bien trouvée là. Il faisait partie d'une entrée monumentale composée de trois immenses arcatures supportées par quatre pilastres, formées d'un faisceau de sept colonnes dont les chapiteaux aux ornements végétaux divisaient l'ogive en sept nervures correspondant aux colonnes. Cette entrée fut démolie à la fin du XIXe siècle lors de l' agrandissement de l'église par allongement de la nef qui avait été reconstruite au XVIIe siècle. Sa partie inférieure était alors sous terre, sur une hauteur de un mètre, suite a 'exhaussement du sol , et le reste était caché par les piliers et arcades d'un porche. Menacé même de destruction, il ne dut sa conservation qu'à l'intervention des archéologues qui obtinrent son classement en 1884. Mais ne pouvant plus être utilisé comme entrée, il fallait le déplacer. On envisagea d'abord de l'appliquer contre la façade extérieure du transept sud, mais on jugea qu'il aurait empiété sur la place publique. On proposa ensuite de le transporter entre deux contreforts des bas cotés du sud ouest dans le jardin de la sacristie, pour finalement décider en 1888 de le remonter à l'intérieur de l'église pour le protéger. Les travaux de reconstitution et de restauration commencèrent en 1889
Mais tout cela mérite des explications, dont la principale réside dans le fait que la cathédrale que l'on voit aujourd'hui n'est que le quatrième édifice construit sur le même emplacement.
- Une première chapelle aurait été édifiée sur ce site à l 'époque mérovingienne. En 1887, on a découvert, dans le jardin de la sacristie, des morceaux de murs de l'abside de cette très ancienne chapelle, et des sarcophages du VIe s attestant de l'existence d'un cimetière devenu par la suite cloître de la cathédrale gothique. On prétend même que cette chapelle occupa l' emplacement d'un temple gallo-romain . En 1893 les fouilles ont permis d' en retrouver le dallage, à presque quatre mètres de profondeur, lors de la démolition de la sacristie.
- La deuxième église fut construite lors du transfert du siège épiscopal au XIe s ( A l 'origine l 'église de Dax , construite vers 506, était située en dehors des murs de la ville, sur l'emplacement de la crypte de Saint Vincent de Xaintes, premier évêque de la ville. Ruinée par les Normands, puis rebâtie à la fin du XIe siècle et enfin démolie au XVIe siècle) ). Elle aurait été consacrée en 1045 - . Mais cette église ne semble pas avoir résisté aux guerres entre Anglais et Français, et en particulier au siège de la ville en 1295. Des débris de futs de colonnes, bases, pilastres, chapiteaux, motifs d'ornements, morceaux d'arcatures, réutilisés dans la construction d'un mur du jardin de la sacristie, furent redécouverts en 1886et 1887 lors de la démolition de ce dernier.
- La troisième fut construite, entre la fin du XIIIe et le XVe siècle dans le style gothique. Jusqu'au XIXe siècle il en restait le porche, les contreforts du coté du jardin, les arcades du cloître, la sacristie et le magnifique portail. Mais ébranlée par les travaux de terrassements des remparts à ses abords, et les démolitions ordonnées en 1523 pour les besoins de défense de la ville contre les menaces espagnoles ( élévation de bastions, destruction partielle du cloître et de la maison des chanoines pour de nouvelles fortifications) un premier écroulement eut lieu en 1623 , puis, en 1638, une partie de la voûte s'effondra avec les piliers et les arcs-boutants qui la soutenaient. Enfin, l'édifice tout entier s'écroula en janvier 1646. Ne subsistait que la partie correspondant à l'ancienne église et la sacristie qui servit d' église provisoire. On retrouva en 1893 un amoncellement de matériaux et des fragments de colonnettes peintes portant des traces de dorures provenant de cet écroulement.
A l'occasion de la démolition de la sacristie en 1893, Dufourcet indique que la cathédrale gothique comportait une série de chapelles latérales autour du déambulatoire . Un petit clocher était à coté du transept sud et un autre à l'est. Ils durent être rasés en 1523 et une partie des voûtes de la chapelle transformée en sacristie furent modifiées au XVIIe probablement par Vauban qui, dit-on, fit le plan du déambulatoire nouveau, alors que les murs extérieurs étaient déjà construits, l'obligeant à obturer la moitié supérieures des grandes baies.
Des fouilles dans le jardin permirent de découvrir, à l'emplacement du cloître, plusieurs tombeaux des XIIe ou XIIIe siècles.
état du portail avant son déplacement
(source BNF VA 40 Landes, H 127886 - SRPI Aquitaine)
curieux ... non ?
(source BNF VA 40 Landes, H 127886 - SRPI Aquitaine)
curieux ... non ?
Une démolition et la reconstruction nécessaires commencèrent en 1647. Mais souvent interrompus par faute de moyens, ce n'est qu'a partir de 1694 qu'ils s'accélérèrent. La voûte de la nef et du déambulatoire ne furent achevés qu'en 1716. De style classique, sur un plan de 1648, modifié en 1661, la nouvelle cathédrale, édifiée sur le modèle de Saint Louis des Invalides à Paris, en style ionique, ne fut livrée au culte qu'à la Pentecôte 1719.
La façade principale et le flanc sud présentent un aspect massif, presque austère, le flanc nord, malgré un certaine raideur a un peu plus de charme.
Les travaux d'achèvement furent longs et difficiles. Elle n'avait toujours pas de clocher. On en entreprit la construction en 1725, mais il s' écroula avant d' être achevé, le 28 octobre 1727, en écrasant dans sa chute plusieurs maisons voisines. Il fut alors remplacé par une simple charpente légère qui supporta les cloches jusqu' au XIXe siècle.
Elle n'est finalement consacrée que le 17 juillet 1755.
Au début du XIXe, l'édifice est déjà délabré, sans façade jamais achevée, ni clocher, et le toit s'effondre avec sa charpente en 1809. Le toit refait, on acheva d' élever un pauvre clocher à la fin de 1814, puis les réparations se succédèrent entre 1819 et 1825, alors que des pierres de la voûte étaient tombées.
En 1859, l'architecte qui venait de restaurer la cathédrale de Bayonne proposa de prolonger la nef et de construire à son extrémité une façade monumentale où s'ouvrirait la porte principale, d'élever un clocher en rapport avec l' ensemble de l'édifice, et remplacer la toiture carrée de la coupole par un dôme. De fait les véritables travaux ne commencèrent qu'en 1881, pour se poursuivre pendant quinze ans. Les architectes avaient souhaité conserver l'ancienne sacristie gothique et la restaurer, mais elle fut démolie en 1893. La façade , longtemps inachevée, fut finalement construite en 1894, sur les plans de l'architecte parisien Paul Gallois.
A l'occasion du creusement de tranchées pour étudier la solidité des fondements des constructions du porche on découvrit un sarcophage en marbre daté du VIe siècle contenant plusieurs squelettes, sans doute déposés là à l occasion d'une précédente découverte d'ossements lors des reconstructions successives.
vue ancienne de la cathédrale de Dax
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