( Description de la France et de ses provinces ... - 1663 ).
De ces gens, la plupart d'entre-nous n'en ont jamais entendu parler avant que, lors de la visite d'une vieille chapelle, on nous ait désigné une petite porte murée: la mystérieuse porte des Cagots. Ou encore ces vieilles cartes postales d'Hagetmau désignant le pont des cagots, le quartier des cagots, la fontaine des cagots
Hagetmau- pont des Cagots et quartier des Cagots
(rasé depuis)
D'origine incertaine et énigmatique, anciennement nommés, du XIIe au XVe siècle, Chrestians, Gézitains ou Gésits ( venant de Giezi, le serviteur hébreu malhonnête d'un prophète de l'Ancien Testament qui aurait été condamné par Dieu à être lépreux, et sa descendance avec lui), les Cagots ( sales, lépreux) ont constitué jusqu'au XIXe siècle une caste inférieure, une population ou race maudite.Le mépris et la haine publique, les humiliations ou mesures vexatoires, parfois les persécutions, poursuivirent longtemps ces malheureux parias cantonnés dans des ghettos séparés des villages.
Les registres paroissiaux qui les désignent comme tels révèlent qu'en Chalosse, presque tous les villages avaient leurs familles cagotes, comme à Amou, Bastennes, Brassempouy (quartier Dous Cagots), Gaujacq, Hagetmau, Miramont, Montfort, Saint Cricq, Saint Sever, etc ... mais on en trouvait aussi à Capbreton (quartier de la Punte), Orx, Saint-Martin de Hinx (quartier des Agots), Saint-Jean-de-Marsacq, Saubrigues, Sainte-Marie-de-Gosse, Seignosse, Soustons ( quartier d Ardy) ... aussi à Arengosse ( quartier de Bezaudun), Magesq, Dax, Saint-Martin-d'Oney, Benquet ...
Hagetmau - fontaine des cagots -
A l'origine cantonnés au métier de charpentier( le bois censé ne pas transmettre de maladies) , on les trouvait particulièrement dans des localités au bord de l'Adour (Mugron, Nerbis, Toulouzette, Laurède, Poyanne, Saint-Geours-d'Auribat, Saint-Pierre et Saint-Jean-de-Lier, Gousse, Gouts, Cazères, puis Candresse, le port de Hinx, Dax et Saint-Paul, Rivière et Saubusse), de la Midouze (Bégaar et Tartas) ou du Gave (Cauneille, Peyrehorade) lorsque le développement de la batellerie appela ces charpentiers à des travaux de construction et entretien des bateaux..
A partir du milieu du XVIIIe siècle, ils devinrent aussi menuisiers, tonneliers, bateliers, maçons, tisserands, tailleurs ....et les femmes souvent sages-femmes
Ils habitaient dans un lieu écarté de la paroisse ou un quartier excentrique des villages. A Laurède, ils ont formé, dit-on, jusqu'à un quart de la population ( sous le nom de Gahécs) dans un quartier nommé Lous Coyes (quartier de Labenne). A Doazit, existait un hameau Les Gesitains au quartier de Pinton près d'Aulès. A Mugron, c'était le quartier du Coutuyot, comme on retrouve le quartier des Capots à Gabarret, au Mas d'Aire, à Roquefort, celui des Cagols à Gaujacq, celui des Gésits à Mont-de-Marsan
Toute une abondante littérature, emplie de théories parfois plus ou moins fumeuses ou ésotériques, en a fait successivement des descendants des lépreux ou pestiférés, des bohémiens, des maures, des juifs, des sarrasins ou wisigoths vaincus, ou de peuplades disparues etc... et même des cathares.
Dans les églises, une entrée leur était réservée. Ainsi, montre t'on dans plusieurs vieilles églises landaises (Capbreton, Ossages, Caupenne, Doazit, Roquefort... ) les traces de la petite porte, parfois murée depuis (comme celles des églises Saint-Martin de Moustey, ou Nerbis, Miramont, Parentis) exclusivement réservée aux cagots. De même, plusieurs de ces églises comportaient deux bénitiers dont l'un uniquement à l'usage des cagots, comme à Brassempouy, Duhort, Laurède, Nerbis, Onard, Siest ou Tilh.
Doazit - église du Mus - porte des Cagots -
Dans son Histoire des races maudites ..., le médiéviste Michel Francisque cite en 1847 l'anecdote d'un riche cagot du début du 18ème siècle ayant à plusieurs reprises pris de l'eau bénite dans le bénitier des habitants et auquel on coupa la main qu'on cloua ensuite à la porte de l'église des habitants.
A leur mort, les Cagots étaient ensevelis dans un cimetière particulier ( Cssen, Coudures, Nerbis, Urgons) ou dans un coin réservé du cimetière.
On en retrouve également trace dans le nom de quelques maisons ou hameaux nommés Chrestian (Audignon, Begaar, Candresse, Cauna, Cazalis, Cazeres, Doazit, Lahose, Laurède, Mugron,.Saint Aubin,.Serreslous).
Moustey - trace de la porte des Cagots murée -
porte des Gagots de l'église de Saint-Aubin
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Pour en savoir plus
Histoire des races maudites en France et en Espagne -F. Michel 1847
Lepreux et cagots du sud ouest H.M. Fay 1910
L'énigme des Cagots - G. Loubès 1998
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Aquère race maudite
Parmi nous es relega,
Estant un reste d'armade
Qui ne poudé plus anna.
Per fort différentes marques
Ets qu'eüs calou dintinga,
Per prebiene la lou lèpre,
Qui l'aüt peuple aüré infectat ;
Mès la mey granne tristesse
Qui lou pays a esproubat,
Era arribade d'un soul houmi,
Be l'apéreben Lacayat.
Au quartier de Labaste
Et que s'ere maridat,
Et toute la paropie
Et ben abé affligeat.
Anats à Lié et à Laürède,
Lous Cagots qu'i a dachat,
Pouryen leba ue armade
Et batés à tout coustat.
(Cette race maudite / Parmi nous se relégua ; / Étant un reste d'armée / Qui ne pouvait plus aller. / Par des marques fort différentes / Ils les fallut distinguer, / Pour prévenir leur lèpre, / Qui le reste du peuple aurait infecté ; / Mais la plus grande tristesse / Que le pays a éprouvée, / Est due à l'arrivée d'un seul homme,/ Que l'on appelle Lacayat. / Au quartier de Labaste / Il s'était marié, / Et toute la paroisse / Il avait affligé. / Allez à Lier et à Laurède, / [Vous verrez que] les Cagots qu'il a laissés, / Pourraient lever une armée / Et se battre de tous côtés).
Voir la suite dans la Dictionnaire gascon-français de l'abbé Vincent Foix - à l'article Cagot -
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